Dans la matrice de Kraljic, les Achats Lourds (ou à goulot d’étranglement) sont des produits qui ne peuvent être fournis que par un fournisseur seulement ou leur livraison est autrement incertaine et ont un impact relativement bas sur les résultats financiers.
Le fournisseur domine le marché malgré un niveau modéré d’interdépendance.
La stratégie pour les achats lourds repose sur plusieurs éléments clés tels que la négociation, le sourcing, l'approvisionnement, l'optimisation et la réduction des coûts. Dans le domaine des achats, les achats lourds font référence à l'achat de biens ou services importants pour l'entreprise, que ce soit en termes de valeur financière, de complexité ou d'impact sur l'activité. Ces achats peuvent concerner des équipements de production, des matières premières, des fournitures spécialisées ou encore des prestations de services stratégiques.
Nous l’avons vu, la principale difficulté avec les achats lourds est de les repérer, tant leur art du camouflage est grand.
Pour ce faire, vous ne pourrez pas vous contenter d’une analyse minutieuse de la base des données. La maille de votre filet est difficile à définir statistiquement et il vous faudra employer d’autres outils.
Mais qu’on le veuille ou non, bien souvent les produits lourds se révéleront le jour où un grain de sable apparaîtra dans un système qui fonctionnait par l’inertie des habitudes. Dans ce cas, la qualité première est la réactivité.
Que vous ayez découvert le produit lourd au prix d’une recherche minutieuse et scientifique ou qu’il se soit imposé à vous suite à un incident, vous avez le devoir de sécuriser son approvisionnement.
Tout d’abord, la première étape de sécurisation passe par un audit détaillé de ce qui rend le produit lourd :
Puis, la deuxième étape consiste à étudier si la complexité ne peut pas être réduite :
Ensuite, la troisième étape de sécurisation est la mise en place du plan d’action.
Si vous intervenez dans l’urgence, les difficultés organisationnelles s’aplaniront facilement. Donc, tous vos interlocuteurs seront très motivés pour éradiquer le problème et la dynamique sera alimentée par la volonté de se sortir de ce mauvais pas.
À contrario, si vous avez diagnostiqué un produit lourd au terme d’une étude d'achats, il vous sera plus délicat de motiver tous vos partenaires internes sur la nécessité d’entreprendre une action.
En effet, pourquoi passer du temps alors qu’il n’y a pas de gros euros en jeu et que tout s’est toujours bien passé ! C’est là que l’on reconnaîtra vos talents d’acheteur et la qualité des relations que vous avez su bâtir au sein de l’entreprise.
Contractualiser n’est pas une panacée. Cela ne remplace pas le plan d’action et les mesures concrètes. Cependant, c’est une précaution utile. Il faut montrer au fournisseur que le sujet traité revêt une grande importance pour votre organisation.
Quelles clauses pouvez-vous discuter ? Cela dépend bien sûr du facteur de criticité que vous avez mis en évidence. Voici quelques exemples.
Pour un produit critique, le fournisseur ne peut pas s’arrêter de produire du jour au lendemain. Vous devez obtenir de lui des engagements sur un délai raisonnable de prévenance, qui doit couvrir la mise en place d’un plan de remplacement.
C’est à vous de l’évaluer. En général, on ne peut pas aller beaucoup plus loin que douze à dix-huit mois.
Si vous êtes confronté à cette situation, le fournisseur pourra demander un « take or pay agreement », un engagement d’achat ferme.
Il s’agit d’un contrat par lequel le fournisseur s’engage à produire une certaine quantité de produits, que l’acheteur s’engage à acheter sur une certaine période. À défaut, l’acheteur payerait le prix des produits fabriqués.
Par la suite, le fournisseur produit une certaine quantité économique pour lui. Il fournit un stock sur le site du client, qui se sert au fur et à mesure de ses besoins. Tous les mois (ou à toute autre fréquence agréée), l’acheteur déclare ses consommations et le vendeur facture sur cette base.
En tant qu’acheteur, vous pouvez bénéficier d’une sécurité de stock plus grande sans alourdir votre BFR.
Également, le fournisseur peut s’engager à tenir systématiquement une cadence d’avance dans ses propres magasins. Ainsi, la bonne pratique consiste à se faire livrer un échantillon du lot en stock avec la précédente livraison.
Cette précaution vous permettra d’être certain de disposer d’un stock contrôlé et conforme à vos spécifications.
Il se peut que la criticité d’un produit provienne de sa faible durée de vie en étagère.
Dans ce cas, il sera bon de négocier une clause selon laquelle le fournisseur s’engage à toujours vous fournir du produit frais, c’est-à-dire avec une durée de vie de x semaines au jour de la réception sur vos quais.
Suivant le cas, vous pourrez demander à votre fournisseur de :
Lorsque vous allez lancer les études statistiques de votre portefeuille, ces produits seront cachés parmi les produits B ou même les produits C. Ils seront donc en première analyse mélangés avec les produits simples.
Une astuce pour essayer de les isoler pourrait être de lancer de nouvelles requêtes dans votre base de données.
Au lieu de lancer vos tris sur les euros ou sur les quantités, vous pouvez trier :
Parmi les produits qui représentent une faible dépense annuelle, certains peuvent avoir une complexité particulière liée au cahier des charges technique. Évidemment, aucune statistique ne vous le dira jamais ! Le mieux est d’organiser plusieurs séances de travail avec les ingénieurs de développement pour survoler le portefeuille afin de déterminer les articles qui ne sont pas de purs produits « catalogue » et qui ont des caractéristiques techniques spécifiques.
Chez un équipementier automobile, la graisse est utilisée en quantité infinitésimale sur le bout du pinceau de l’opérateur. Mais très peu de produits vendus y échappent.
1er filtre statistique : bien sûr, cette graisse est gérée comme un consommable. Ce petit détail induit un paramétrage différent auquel personne n’a pris garde.
Le résultat est que ce produit, avec quelques-uns de ses « camarades », a été exclu de la liste des articles !
2e filtre technique : au service Développement, personne ne parle de cette graisse. Elle a fait son apparition suite à une réclamation d’un client. Le petit coup de pinceau était donc l’action corrective mise en place à cette époque.
3e filtre « nomenclature » : seule la visite de l’atelier peut attirer votre curiosité d’acheteur. Heureusement, vous ne descendez jamais dans l’atelier sans votre carnet pour noter les références.
En remontant au bureau, votre enquête vous amène à découvrir une graisse qui vaut 39 euros/kg et pour laquelle le fournisseur japonais annonce neuf semaines de délai départ d'usine… et une durée de péremption de trente semaines !
Conclusion : vous mettez immédiatement en place une procédure de surveillance du FIFO, des dates de péremption à réception. Vous négociez avec le fournisseur la réception de pots ayant toujours au minimum quinze semaines de vie… Bref, vous évitez à tout prix de devoir accomplir un miracle !
Il n’y a pas de profil type pour les articles lourds, vous pourrez en trouver dans tous les portefeuilles.
Il n’est pas question de spécialiser un acheteur sur les produits lourds. Savoir gérer les articles lourds fait partie de la gamme classique d’un acheteur.
Le junior comme le senior doivent savoir sécuriser leur entreprise sur ces produits.
Même s’il vous semble perdre du temps par rapport aux produits lourds ou aux produits stratégiques, les produits lourds méritent toute votre concentration.
La direction des achats joue un rôle clé dans le processus d'achat des achats lourds. Elle est responsable de la passation des appels d'offres, de la gestion des panels de fournisseurs et de la relation fournisseur. Elle pilote également les négociations avec les fournisseurs stratégiques, en cherchant à obtenir les meilleures conditions d'achat possible en termes de prix, de qualité, de délais de livraison et de services associés. La stratégie d'achat repose également sur la gestion de la supply chain et la politique d'achat de l'entreprise. Il s'agit d'optimiser les flux logistiques, de rationaliser les processus d'achat et de mettre en place des outils d'optimisation des coûts. Cela peut inclure l'utilisation de tableaux de bord pour suivre les performances d'achat, l'utilisation d'erp pour faciliter la gestion des stocks, la dématérialisation des procédures d'achat, etc. Dans le domaine des achats lourds, la relation fournisseur est essentielle. Il convient de sélectionner les fournisseurs stratégiques qui répondent aux critères de l'entreprise en termes de qualité, de fiabilité, de flexibilité et de compétitivité.